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Accessibilité et grande vitesse : la logique spatiale des réseaux ferroviaires français et anglais
(1992)
Auteur : Jean-Charles Denain

L'accessibilité est devenue un enjeu majeur dans l'organisation spatiale et l'intégration d'un territoire : elle va dépendre à la fois de la nature des émetteurs/récepteurs (les villes) et de la qualité des vecteurs (la forme et l'organisation du réseau). Certaines villes ou régions vont s'affranchir des distances tandis que d'autres ne le pourront pas, accentuant les disparités liées aux caractéristiques socio-économiques et géographiques.

Une approche simple de l'accessibilité peut à la fois mettre en évidence les logiques territoriales des pays à travers leur système de liaisons ferroviaires et leurs choix technologiques, et permettre de les comparer. Un temps moyen a été calculé pour chaque ville de la zone transmanche, d'après les temps de parcours de gare à gare, durant l'hiver 1991-1992 (avant l'ouverture du TGV Nord). On a ainsi obtenu une hiérarchie urbaine, qui permet de distinguer les villes les plus accessibles de celles qui le sont moins (à cause d'absence de liaisons rapides, de temps d'attente important...). Ce classement peut être représenté cartographiquement par des isochrones et montrer les regroupements des villes selon un temps moyen d'accès inférieur à deux heures, trois heures, etc. On peut distinguer dans la carte présentée, la transcription des logiques territoriales liées à chaque réseau ferroviaire.

Le Royaume-Uni a choisi en matière de grande vitesse le train pendulaire, qui emprunte aussi bien les lignes radiales centrées sur Londres que les transversales à l'ouest (200 km/h). Le cadencement des fréquences avec cet InterCity, couplé aux trains Express du réseau classique, a permis de généraliser une bonne accessibilité pour deux tiers des villes du sud de l'Angleterre. Elles forment un groupe spatialement très homogène car elles bénéficient de bonnes interconnexions, notamment pour la partie ouest (voir l'isochrone correspondant au temps moyen d'accès inférieur à trois heures). Les Cornouailles, exclues de cette zone centrale, peuvent être considérées comme de véritables « finistères » car, en plus d'une situation géographique défavorable, la vitesse de l'InterCity reste relativement faible et empêche tout gain de temps par rapport aux autres (145 km/h en moyenne dans cette région vallonnée).

 

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Le choix technologique français s'est porté sur la construction de lignes à grande vitesse en site propre. L'implantation d'un TGV entre Paris et Le Mans a pour effet de favoriser considérablement l'accessibilité des villes bretonnes malgré leur situation périphérique, grâce à un « saut de puce » de 300 km/h (voir l'extension à l'ouest de l'isochrone de trois heures). La faible fréquence des TGV et l'absence de transversales évitant la capitale parisienne, ne permet pas d'améliorer l'accessibilité à l'ensemble du territoire. C'est ainsi que d'autres villes, dans des régions plus centrales, peuvent avoir des temps moyens d'accès comparables et être considérées à leur tour comme zones périphériques, non plus en termes de distance mais en termes de temps (c'est le cas de la Normandie depuis l'ouverture du TGV Nord).

La France et le Royaume-Uni ont développé des moyens de communication ferroviaire d'autant plus rapides que les distances à parcourir étaient grandes. Chaque type de liaison grande vitesse, avec ses avantages et ses inconvénients, a produit des logiques territoriales distinctes pour le service grandes lignes, changeante avec le temps. On peut les résumer de la manière suivante : « pouvoir aller rapidement » avec la SNCF et le TGV, « pouvoir aller un peu moins vite dans un plus grand nombre de lieux » avec les compagnies britanniques et l'InterCity, ce qui ramène sans aucun doute, à la question des choix stratégiques à effectuer dans l'aménagement d'un territoire.


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